Rio, le 18 juin 2012

 

 

 

L’économie verte et sociale sera aussi bleue, et c’est maintenant !

 

 

Relever le défi de l’accès à l’eau potable et de l’assainissement d’ici 2030

Une urgence pour tous à soutenir à la Conférence Rio+20 !

 

 

 

 

 

Monsieur le Président de la République,

 

 

En ouverture du forum du club « France Rio + 20 », lequel a rassemblé le 8 juin dernier des élus territoriaux, responsables d’associations et d’entreprises, ONG, syndicats, vous avez déclaré  « nous attendons des actes, non pas demain mais aujourd’hui, qui devront faire naître un autre modèle de développement », et souligné que « la conférence de Rio sera difficile, comprendra des risques, celui de la division entre pays développés, pays émergents, pays pauvres, celui de l’échec parce qu’il peut y avoir d’autres urgences« .

 

Ayant conscience que l’humanité a un rendez-vous critique avec elle même et que la sortie de route est possible, nous, élus de terrain de toutes sensibilités confondues, proches des citoyens, souhaitons vous faire part de notre engagement et de notre soutien pour répondre à ces défis majeurs que la France, dans le cadre de l’Union Européenne, souhaite relever lors de la conférence Rio+20 : « l’accès plus équitable, plus universel aux énergies renouvelables », « la sécurité alimentaire » et « le soutien à l’économie verte« .

 

Parmi ces défis, il en est un, majeur, à  nos yeux : celui de l’EAU.

L’eau occupe une position singulière ;  non substituable, elle constitue assurément la ressource la plus importante pour la survie du vivant et donc de l’humanité. Sans eau, vous le savez, il n’est pas de vie possible sur Terre. Elle s’inscrit au cœœur même du développement durable en contribuant directement à la protection de la santé et de l’environnement, au développement économique, à la valorisation sociale et à la création de nombreux emplois.

A l’heure actuelle 50% de la population mondiale vit dans des villes, 80% en 2030. Entre 3 et 4 milliards d’êtres humains n’ont pas accès à une eau potable et 2,65 milliards ne disposent pas d’un assainissement de base.

L’accès à l’eau potable et à l’assainissement, devrait, dans la gestion des priorités constituer dès lors une toute première urgence mondiale en tant que droit humain reconnu par les Nations unies en 2010.

Nous avons une obligation de réussite. La paix sociale, l’équité et la réduction des inégalités en dépendent. L’ampleur des mutations est immense. La France dans l’Europe peut porter cet élan, tracer la voie, solidaire vis à vis des démunis, comme elle a su le faire dans le passé, attitude profitable simultanément  aux pays émergents, comme à ceux confinés à la marge du développement.

Pour  l’eau, au plan mondial nous élus de terrain, défendons les cinq  priorités suivantes :

 

 

 

 

  1. La mise en œœuvre universelle et effective du droit à l’eau et à l’assainissement en renforçant le rôle des autorités locales

En 2009, le Pacte d’Istanbul a été initié afin de permettre aux autorités locales et régionales de développer des stratégies de gestion de l’eau mieux adaptées aux changements de notre planète. Populations et milieux de vie constituent un tout indissociable, le développement de l’un n’allant pas sans la prise en compte de l’autre. S’accordant au principe de subsidiarité, le niveau local est l’échelon légitime et pertinent de l’organisation du service de l’eau et de l’assainissement.

 

  1. 2.       La mise en œœuvre de la gestion intégrée des ressources en eau par bassin versant et la ratification de la convention des Nations Unis de 1997 sur les cours d’eaux internationaux.

La gestion des ressources en eau doit se faire à l’échelle des bassins versants nationaux ou transfrontaliers et s’accompagner de la mise en place d’organismes de bassin pouvant assurer une « démocratie de l’eau ».Ces comités de bassin fonctionneraient comme des « parlements » de l’eau, afin de construire une vision partagée sur les enjeux du bassin et des programmes d’actions concrets et chiffrés. C’est un processus participatif continu qui reconnaît et fait intervenir les populations locales aussi bien en amont qu’en aval en permettant de gérer les éventuels intérêts contradictoires des usagers.

Il est indispensable que les pays établissent un accord international pour la gestion des bassins transfrontaliers comme le préconise la Convention des Nations Unies de 1997 sur l’utilisation des cours d’eau internationaux.

 

  1. 3.       La prise en compte pour une économie verte des services rendus par les écosystèmes, notamment l’eau, et de sa valeur économique

 

Les Nations Unies conviennent de la gravité des pertes et de la dégradation de la biodiversité mondiale, et insistent sur ses conséquences : la perte des services écosystémiques affectent la sécurité alimentaire, l’accès à l’eau, la santé des populations pauvres notamment rurales et autochtones.

L’eau douce est rare et précieuse. Sa gratuité ne conduit pas à s’en préoccuper, à entretenir son accès, à en faire bon usage. Est-il normal de continuer à la gaspiller, à la polluer, par des politiques ou des procédés industriels inappropriés ?

L’eau  devrait être gérée comme un bien commun de l’humanité, dans l’intérêt général. Elle renvoie au difficile apprentissage du vivre ensemble basé sur la concertation et s’organisant selon des principes supérieurs aux règles de la concurrence. L’assainissement est lui aussi essentiel, tant pour la préservation de la ressource, que la santé des populations.

 

  1. 4.       La mise en œœuvre par les autorités locales de financements solidaires pour les plus démunis sur leur territoire et en coopération internationale.

 

Les autorités  locales sont des acteurs incontournables en matière de services d’eau et d’assainissement. Certains pays ont favorisé pour leurs autorités locales la mise en place de mécanismes de financements solidaires, volontaires et ciblés spécifiquement sur l’accès à l’eau et à l’assainissement des plus démunis sur leur territoire et en coopération internationale. C’est le cas de la France grâce aux lois Oudin-Santini de 2005 et Cambon de 2011.

L’indispensable solidarité internationale ne doit pas occulter la nécessaire solidarité nationale à travers une aide aux familles les plus démunies dont la facture d’eau est souvent supérieure à 3% du budget familial.

De même les exclus doivent partout pouvoir retrouver un lien avec l’eau en tant que de besoin pour l’alimentation et l’hygiène.

Nous souhaitons donc que soit promu au niveau mondial ce type de mécanisme innovant qui permettrait de lever des fonds conséquents et de renforcer les échanges de savoir-faire entre autres autorités locales.

 

  1. 5.       La consolidation du « pôle eau » dans la gouvernance internationale

 

Notre action sur un seul territoire est insuffisante, la lutte doit être mondiale. Il faut une Organisation des Nations unies pour l’environnement et y inscrire une véritable gouvernance mondiale de l’eau. Les collectivités, et, au delà, toutes les composantes de la société civile doivent être représentées, une place à la hauteur de nombreuses actions qu’elles mènent pour le développement durable.

 

Nous ne voulons pas d’un avenir subi. C’est pourquoi, Monsieur le Président, nous tenons à vous assurer de notre engagement et de notre mobilisation pour répondre avec audace aux enjeux que vous défendrez à Rio, et vous prions d’agréer l’expression de notre plus profond respect

 

 

 

 

 

 

 

Daniel   Marcovitch

Conseiller de Paris

Président de l’Association Française des Etablissements Publics   Territoriaux de Bassin

Michel   Delebarre

ancien ministre d’Etat

Président de Cités Unies France

sénateur maire de Dunkerque

Henri   Bégorre

Maire de Maxéville

Président du Partenariat Français pour l’Eau